La pomme de terre dite la patate est présente au quotidien dans les assiettes des français. Mais savez-vous d’où elle vient ?? Eh bien, c’est au Pérou, il y a environ 8000 ans qu’elle a été utilisée pour la première fois et son arrivée en Europe remonte à la fin du XVIème par la découverte des Amériques par les Conquistadores.
La connaissons nous vraiment ?
Le hasard a très bien fait les choses : en navigant sur le net, je suis tombée sur le site d’un producteur et ce visuel a fait le reste ! Nous retrouvons régulièrement les mêmes variétés sur les étals de nos primeurs alors qu’en réalité il en existe un panel de couleurs et de saveurs incroyable !
Je n’ai donc pas résisté à l’envie d’en savoir plus !
C’est une belle histoire de famille née en 1910 au cœur du Santerre, terroir picard, et aujourd’hui, elle est gérée avec passion par Françoise et Bertrand qui ont été rejoints par leurs enfants Adèle et Florent. Ensemble, leurs valeurs et leur savoir-faire ont dépassé les frontières régionales puisque leur production a intégré les cuisines des chefs qui placent leurs récoltent au cœur de la gastronomie française. Leur prestigieux parrain Eric Briffard, Chef étoilé et Meilleur Ouvrier de France, membre fondateur du Collège Culinaire de France, leur a permis d’avoir la reconnaissance de leurs pairs au travers du label de Producteur Artisan de Qualité.
Je n’ai donc pas résisté à l’envie d’en savoir plus !
Françoise Bayard a accepté de me consacrer un peu de temps afin de répondre aux questions de la néophyte que je suis.
Moi : Françoise, qu’est ce qui vous a donné l’envie de cultiver des variétés aussi différentes ?
Françoise : Ohh… C’est arrivé petit à petit ! Quand on est arrivés dans la ferme familiale, o a commencé par la Bintje comme tout le monde… Mais on n’aimait pas faire comme tout le monde … on n’était un peu spécial (Sourire).
La Charlotte
La Ratte de Santerre
La Vitelotte
On a commencé à faire des Rattes, des Charlottes quand elles n’étaient pas encore à la mode et un jour on m’a donné deux ou trois plants de Vitelotte que j’ai planté au milieu d’un champ pour voir ce que ça pouvait donner, me confie-elle sur un ton amusé ! On m’a dit « attention ! ça va vous apporter toutes les maladies !!! ». En réalité non, elles n’étaient pas malades ! (Rires). Et puis, on a relancé la Vitelotte dans les années 90.
Moi : Elles n’étaient pas encore à la mode !
Françoise : Eh oui, c’est vrai qu’on est en plein cœur de la région de la pomme de terre. Le Santerre c’est notre petite région agricole et le terroir est vraiment bien pour la pomme de terre. On est à 10km de Montdidier, là où est né Parmentier !
Et puis, comme on aimait se démarquer vis-à-vis des autres, la pomme de terre ici c’était vraiment basique… la patate ! (Rires). Ils vendaient à l’export, par 25kg, pas lavés ! Nous, on a commencé à laver les pommes de terre, après on a commencé à les mettre en petits sachets d’un et deux kilos… Et puis on s’est démarqué petit à petit….
Moi : C’est comme ça que vous avez commencé à intéresser les Chefs ?
Françoise : Avec les Chefs c’est une histoire de rencontre. J’étais en Corse, invitée par un client qui faisait un petit salon avec ses fournisseurs et il avait invité également des Chefs et j’ai fait la connaissance d’Éric Briffard qui était au Georges V à l’époque et qui m’a dit : « oh j’aimerais bien avoir des échantillons et l’aventure a commencé.
Et il y a eu Pierre Sang qui est venu sur le salon « Cuisinez » (salon qui regroupe des petits producteurs) et m’a dit qu’à Lyon, il avait toujours travaillé nos produits et il voulait faire une démonstration avec la Blue Belle. Donc on a dit ok à chaque fois et on est devenu amis.
Moi : C’est par Éric Briffard que vous avez intégré le Collège Culinaire de France ?
Françoise : Il a leur a donné notre adresse au tout début des Producteurs Artisans de Qualité et on a reçu un courrier. On ne savait pas ce qu’était le collège culinaire, j’ai donc appelé et on m’a dit : « vous savez, ça serait dommage que vous ne nous rejoignez pas, vous avez un parrain prestigieux » et comme c’était Éric Briffard on a dit ok on y va ! (Rires). Comme je vous l’ai dit, tout est une histoire de rencontres !
Moi : La gastronomie est un petit univers qui va au-delà de ce que montre la communication. Toutes les valeurs comme les bons produits, bien manger, le respect du terroir, des animaux, etc. Les gens reviennent de plus en plus aux vraies valeurs. C’est la différence entre la patate et la pomme de terre (Rires). En la travaillant comme vous le faites, vous lui rendez ses lettres de noblesses !
Françoise : Oui c’est vrai, même si les gens aiment le mot patate !!! (Rires)
Moi : Oui, ça a un côté « terroir », la patate est dans les assiettes des français. Mais certaines de vos variétés, on sort quand même de « la patate » !
Françoise : Exactement ! Mauro Colagreco, Chef du Myrazur, nous a appelé, un jour, pour nous demander des pommes de terre de 5 à 10g ! Ça nous amuse mais on ne sait toujours pas ce qu’il en fait ! (Rires)
Moi : Mais ce sont des toutes petites rattes ??
Françoise : oui ! Quand il est ouvert on le livre toutes les semaines ! Il va falloir, un jour, qu’on aille voir ce qu’il en fait ! (Je vous avoue que je me joindrais volontiers à elle pour enquêter !)
Et ça nous fait toujours plaisir quand on sait qu’il a été élu Meilleur Restaurant au Monde…
Moi : C’est une reconnaissance méritée !
Moi : Comment choisir la variété la plus appropriée quand on veut une pomme de terre originale quand on est une néophyte comme moi ?
Françoise : Il existe les pommes de terre à chair ferme et à chair tendre
Moi : Comment est-ce qu’on peut les reconnaître sur nos étals ?
Françoise : les chairs fermes sont plus petites et allongée, elles ne se défont pas à la cuisson. Dans les chairs fermes ; il y a les peaux jaunes et les peaux rouges. Dans les peaux rouges, il n’y en a pas beaucoup, il y a la Chérie, la Cheyenne et il y avait, dans le temps, la Roseval qu’on trouve de moins en moins.
La Chérie
La Cheyenne
La Roseval
Dans les peaux jaunes il y avait la Belle de Fontenay, la BF 15 mais maintenant elles ont un peu disparu, la Charlotte est aussi est en train de mourir parce que c’est une des plus vieilles et que maintenant il y a des variétés plus récentes et de meilleure qualité et surtout plus résistantes aux maladies. Par exemple, la ratte c’est une catastrophe, elle est très fragile et il est inconcevable de l’envisager en bio, si dans son jardin oui mais pas en plein champ, s’il y a un mildiou qui traîne vous pouvez être sûre qu’elle l’attrape. C’est pour çà qu’on n’est pas parti dans le bio. On est plus hautes valeurs environnementales, c’est-à-dire qu’on fait une production très raisonnée et qu’on ne met des produits que quand c’est absolument obligatoire.
Maintenant, il y a énormément de chairs fermes la Charlotte comme l’Amandine, la Laurette, la Jazzy on la voit partout parce qu’elle est jolie mais je trouve qu’elle a un goût métallique donc on ne la cultive pas parce que je ne l’aime pas ! (Rires)
Moi : On a ce point en commun : quand on n’aime pas… C’est non !!! (Rires)
Françoise : Par contre, on fait une variété qui est la Juliette des Sables. On travaille avec 4 producteurs en Baie de Somme pour la cultiver et on a fait des essais il y a une quinzaine d’années et elle n’avait pas une jolie peau mais elles étaient délicieuses. Aujourd’hui, les gens qui la goûtent retrouvent le vrai goût de la pomme de terre. (Je confirme ! J’ai eu le même retour d’un Ch’ti accro à la pomme de terre ; il a été bluffé !) Elle est plus ferme que la Charlotte mais moins farineuse que la ratte. C’est comme la Vitelotte, on ne la laisse pas trop grossir pour qu’elle ne soit pas farineuse.
La Juliette des sables
Je vais maintenant partager avec vous les astuces d’une pro !
Françoise : Je ne rince pas les chairs fermes, je les épluche et les poêle dans de l’huile avec un peu de beurre.
Les frites, je les rince à l’eau chaude et je les sèche pour éviter qu’elles se collent les unes aux autres !
Moi : Pourquoi à l’eau chaude ???
Françoise : Je ne sais pas trop pourquoi ! (Rires). J’ai vu faire ma mère et ma grand-mère, alors je fais pareil !!
Moi : Quel est le rôle de l’amidon ?
Françoise : Plus il y a d’amidon, plus les frites seront bonnes et moins il y a d’amidon moins les chairs fermes se déferont à la cuisson. Dans une chair ferme ça a toujours entre 17 et 20% de matière sèche donc d’amidon, et pour une frite il en faut un peu plus de 22%, le reste c’est de l’eau. On dit que les pommes de terre qui ont le moins d’amidon ne font pas grossir… Sauf si on rajoute du beurre et de la crème ! (Rires)
Moi : Avez-vous envie de nous dire quelque chose, nous qui ne sommes que des amateurs ?
Françoise : Oui j’aimerais expliquer une chose : les grenailles ne sont pas une variété comme beaucoup de gens le pensent. C’est un calibre. Chaque variété a ses grenailles qui mesurent moins de 38mm et en dessous il y a la mitraille, au-dessous le calibre normal et ensuite le hors calibre qui est gros pour être une chair ferme.
Moi : La grenaille n’est pas un objectif de récolte ?
Françoise : Non sauf pour des variétés spécifiques à Noirmoutier et à l’Ile de Ré. Il y a toujours tous les calibres.
Pour nous, pour une chair ferme, il faut arrêter sa végétation quand elle est dans sa matière sèche idéale. On la calcule tout le temps : pour récolter quand elle arrive à 20 et avant qu’elle ne se démonte à la cuisson. On a une machine qui nous aide et on les goûte tout le temps de la culture. A ce moment, on défane en broyant les feuilles pour que la pomme de terre arrête de grossir. On le fait avec un tracteur, on ne veut pas utiliser des produits pour le faire.
Voilà, j’ai voulu vous emmener dans les coulisses de cette exploitation agricole… J’espère vous avoir permis d’en apprendre un peu plus sur cet incontournable de nos assiettes et surtout vous avoir donné envie de vous lancer avec ces produits d’exception. Si vous voulez vous régaler comme moi, commandez en direct auprès de la Maison Bayard.
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Je tiens à remercier de tout cœur la famille Bayard pour leur gentillesse et leur collaboration dans la rédaction de ce reportage.